Le Peintre d’éventail

J’achève une très belle lecture : « Le Peintre d’éventail » de Hubert Haddad. Ayant déjà dévalisé les rayons « poésie » des librairies de tout ce qui se rapportait de près ou de loin aux haïkus (ou haïkaï pour les plus puristes), j’étais néanmoins passé à côté de ce beau livre (je parle ici de la couverture).

L’histoire : un homme se retire au fin fond du Japon, dans une pension où résident des personnages singuliers et hauts en couleurs. Chacun a son histoire, son passé, et ses rêves de futur. Parmi eux : un vieux jardinier, qui a façonné un petit bijou végétal, un « véritable labyrinthe aux perspectives trompeuses » et qui, à ses heures perdues, peint des paysages sur de larges éventails, accompagnés de haïkus. Petit à petit, une complicité naît entre Matabei (le nouveau pensionnaire) et le vieux Maître Osaki.

C’est un roman d’initiation, de transmission à plusieurs niveaux, c’est une lecture contemplative, au rythme mesuré, aux fulgurances délicieuses. Mais, tout comme le Maître apprend que les contrastes donnent leur beauté au jardin (et qu’il appelle « l’harmonieux vertige »), la lecture passe, comme un rayon de soleil soudain masqué d’un nuage noir, au bouleversement, au désespoir, au malaise, qui survient en une phrase cinglante ou une longue description pareille à un poison.

Imagé et imaginatif, le style de Hubert Haddad, que certains pourraient trouver trop contemplatif par endroits, fait ressentir la beauté des lieux, nous donne à voir l’inquiétude ou le ravissement, l’amertume du regret ou l’espoir, et la beauté indicible de la nature, avec maestria.

 

Ultime originalité : un second livre, « Les Haïkus du peintre d’éventail » consigne les haïkus créés par Maître Oseki. On comprendra toute leur importance à la fin du « Peintre d’éventail »… Un recueil d’environ 500 haïkus, œuvre à part entière, livre dans le livre, à déguster en parallèle, avant ou après le roman.

Pour finir, quelques passages qui, je l’espère, vous donneront envie de faire ce voyage :

« Chaque hiver, c’est la même surprise, comme s’il fallait recommencer à partir de rien la grande fresque du temps. Il neige sur le temps comme sur la mémoire »

« Peindre un éventail, n’était-ce pas ramener sagement l’art à du vent ? »

et un haïku de circonstance :

Avril impatient
La première hirondelle
N’est qu’une alouette

Le Peintre d’éventail et Les Haïkus du peintre d’éventail, éditions Zulma.

photo copie 2

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